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PRÉFACE


Je donne ce livre pour ce qu’il vaut. C’est un fruit plein de cendre amère ; il est pareil aux coloquintes du désert qui croissent aux endroits calcinés et ne présentent à la soif qu’une plus atroce brûlure, mais sur le sable d’or ne sont pas sans beauté.

Que si j’avais donné mon héros pour exemple, il faut convenir que j’aurais bien mal réussi[1] ; les quelques rares qui voulurent bien s’intéresser à l’aventure de Michel, ce fut pour le honnir de toute la force de leur bonté. Je n’avais pas en vain orné de tant de vertus Marceline ; on ne pardonnait pas à Michel de ne pas la préférer à soi.

Que si j’avais donné ce livre pour un acte

  1. Il a paru en juin une édition petit in-8o de ce livre, tirée à 900 exemplaires sur vergé d’Arches.