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ISABELLE

rangée, le moindre ébranlement risquait de compromettre l’équilibre de la pensée. Enfin il s’installa, plongea jusqu’à mi-jambes dans la chancelière, ne bougea plus…

De mon côté je feignais de m’absorber dans mon travail ; mais j’avais grand-peine à tenir en laisse ma pensée ; et je n’y tâchais même pas ; elle tournait autour de la Quartfourche, ma pensée, comme autour d’un donjon dont il faut découvrir l’entrée. Que je fusse subtil, c’est ce dont il m’importait de me convaincre. Romancier, mon ami, me disais-je, nous allons donc te voir à l’œuvre. Décrite ! Ah, fi ! ce n’est pas de cela qu’il s’agit, mais bien de découvrir la réalité sous l’aspect… En ce court laps de temps qu’il t’est permis de séjourner à la Quartfourche, si tu laisses passer un geste, un tic sans t’en pouvoir donner bientôt l’explication psychologique, historique et complète, c’est que tu ne sais pas ton métier.

Alors je reportais mes yeux sur Monsieur Floche ; il s’offrait à moi de profil ; je voyais