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ment trouvée… Par malheur, elle ne contenait pas son homme ; il débordait de toutes parts. Car s’il était pourtant de ceux pour qui « une seule chose est nécessaire : connaître Dieu », du moins, cette connaissance de Dieu, voulait-il la répandre à travers son œuvre dans son humaine et anxieuse complexité

Ibsen non plus n’était pas facile à réduire ; non plus qu’aucun de ceux dont l’œuvre demeure plus interrogative qu’affirmative. Le succès relatif des deux drames : Maison de poupée et l’Ennemi du peuple, n’est point dû à leur précellence, mais cela vient de ce qu’Ibsen y livre un semblant de conclusion. Le public est mal satisfait par l’auteur qui n’aboutit pas à quelque solution bien saillante ; c’est pécher par incertitude, croit-il, paresse de pensée ou faiblesse de conviction ; et le plus souvent, goûtant fort peu l’intelligence, cette conviction il ne la jauge qu’à la violence, la persistance et l’uniformité de l’affirmation.

Désireux de ne point élargir encore un sujet déjà si vaste, je ne chercherai pas aujourd’hui à préciser sa doctrine ; je voulais seulement indiquer ce qu’elle renferme de contradictions pour l’esprit occidental, peu accoutumé à ce désir de conciliation des extrêmes. Dostoïevsky reste convaincu que ces contradictions ne sont qu’apparentes entre le nationalisme et l’européisme, entre l’individualisme et l’abnégation ; il pense