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VI

Je me sens accablé par le nombre et l’importance des choses qui me restent à vous dire. C’est aussi, vous l’avez bien compris dès le début, que Dostoïevsky ne m’est souvent ici qu’un prétexte pour exprimer mes propres pensées. Je m’en excuserais davantage si je croyais, ce faisant, avoir faussé la pensée de Dostoïevsky, mais non… Tout au plus ai-je, comme les abeilles dont parle Montaigne, cherché dans son œuvre de préférence ce qui convenait à mon miel. Si ressemblant que soit un portrait, il tient toujours du peintre, et presque autant que du modèle. Le modèle est sans doute le plus admirable qui autorise les ressemblances les plus diverses et prête au plus grand nombre de portraits. J’ai tenté celui de Dostoïevsky. Je sens que je n’ai pas épuisé sa ressemblance.

Je suis également accablé par la quantité des retouches que je voudrais apporter à mes causeries précédentes. Je n’en ai point fait une que je n’aie, tout aussitôt après, senti ce que j’avais