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II

Les quelques vérités d’ordre psychologique et moral que les livres de Dostoïevsky vont nous permettre d’aborder me paraissent des plus importantes et il me tarde d’y venir ; mais si hardies et si neuves, qu’elles risqueraient de vous paraître paradoxales si je les abordais de front. J’ai besoin de précautions.

Dans notre dernière causerie, je vous ai parlé de la figure même de Dostoïevsky ; il me semble opportun à présent, et précisément pour faire valoir d’autant plus les particularités de cette figure, de la replonger dans son atmosphère.

J’ai connu intimement quelques Russes ; mais je n’ai jamais été en Russie ; et ma tâche serait ici bien ardue, si je n’étais aidé. Je vous exposerai donc tout d’abord les quelques observations sur le peuple russe que je trouve dans un livre allemand sur Dostoïevsky. Mme Hoffmann, son excellent biographe, insiste tout d’abord beaucoup sur cette solidarité, cette fraternité pour tous et pour chacun, qui, à travers toutes les classes de la société russe, abou-