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« Je vous admirais déjà, lui dit-il. Je savais que la vie, lorsqu’elle entre en vous, ne peut plus sortir et vous mène. Mais je considérais les sentiments comme étant mon domaine. En ce temps-là je croyais faire figure auprès de vous. Comme les gens qui sont seuls, j’ai besoin d’être grand. Et c’est pourquoi vraiment je souffre aujourd’hui… Ma pauvre vie est bien peu de chose à côté de la vôtre qui se répand dans le monde entier. Vous êtes un homme complet. Votre générosité, votre bonté sont aussi fortes que les miennes, et chez vous il y a encore autour d’elles une foule de sentiments que je ne possède pas. »

Croquignole, assez ému à son tour, mais surtout fort étonné par ce langage, ne trouve à lui dire que cette phrase admirable :

« — Ce qui m’étonne, c’est que j’avais toujours cru qu’il fallait que je réforme ma conduite. »

Et tout d’un coup :

« — Tenez, monsieur Félicien, vous avez raison, j’aime tout et je ne respecte rien. Eh bien ! vous, je vous respecte. »

Voici les personnages posés. Félicien, du reste, ne va jouer aucun rôle (aucun rôle actif dans cette