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avait aliéné ce riche héritage, et le revenu qu’ils tiraient d’un exercice minutieux et vexatoire de leurs prérogatives, suffisait à peine à l’entretien de leur maison. Leurs armées n’étaient fondées que sur le service, soit légal, soit volontaire, de leurs différens feudataires, qui ne passaient les Alpes qu’avec répugnance, se permettaient toute espèce de rapines et de désordres, et désertaient souvent avant la fin de la campagne. Le climat de l’Italie en détruisait des armées entières ; ceux qui échappaient à sa meurtrière influence reportaient dans leur patrie les ossemens de leurs princes et de leurs nobles[1] ; ils imputaient quelquefois l’effet de leur intempérance à la perfidie et à la méchanceté des Italiens, qui du moins se réjouissaient des maux des Barbares. Cette tyrannie irrégulière combattait à armes égales contre la puissance des petits tyrans du pays ; l’issue de la querelle n’intéressait pas beaucoup le peuple, et doit aujourd’hui peu intéresser le lecteur ; mais aux onzième et douzième siècles, les Lombards ranimèrent le flambeau de l’industrie et de la liberté, et les républiques de la Toscane imitèrent enfin ce généreux exemple. Les villes d’Italie avaient toujours conservé

  1. Après les avoir fait bouillir. Les vases destinés à cet objet étaient au nombre des ustensiles indispensables au voyage ; et un Germain qui faisait bouillir les os de son frère dans un de ces vases, le promettait à son ami, lorsqu’il s’en serait servi. (Schmidt, t. III, p. 423, 424.) Le même auteur observe que toute la lignée saxonne s’éteignit en Italie (t. II, p. 440).