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qu’il désirait ; Rome fut sauvée une seconde fois, et, sous la férule d’un maître étranger, Astolphe apprit enfin à respecter la justice et la bonne foi. Après ce double châtiment, les Lombards ne firent plus que languir et déchoir l’espace d’environ vingt ans. Leur caractère toutefois ne s’était pas conformé à l’abaissement de leur condition ; et au lieu de s’adonner aux paisibles vertus des faibles, ils fatiguèrent les Romains par une multitude de prétentions, de subterfuges et d’incursions qu’ils renouvelèrent sans réflexion, et qu’ils terminèrent sans gloire. Leur monarchie expirante était pressée d’un côté par le zèle et la prudence du pape Adrien Ier et de l’autre par le génie, la fortune et la grandeur de Charlemagne, fils de Pepin : ces héros de l’Église et de l’état se réunirent par une alliance et par l’amitié ; et lorsqu’ils foulèrent les faibles à leurs pieds, ils eurent soin de se couvrir des plus spécieuses apparences de l’équité et de la modération[1]. Les défilés des Alpes et les murs de Pavie étaient la seule défense des

  1. Ils négligèrent cependant cette précaution lors du divorce de la fille de Didier, que Charlemagne répudia, sine aliquo crimine. Le pape Étienne IV s’était opposé avec fureur au mariage d’un noble Franc, cum perfidâ horridâ, nec dicendâ, fœtentissimâ natione Longobardorum, à laquelle il attribue l’origine de la lèpre. (Cod. Carol. epist. 45, p. 178, 179) L’existence d’une première femme était encore une raison contre ce mariage. (Muratori, Ann. d’Ital. l. VI, p. 232, 233-236, 237.) Mais Charlemagne se permettait librement la polygamie ou le concubinage.