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Jésus-Christ, était vraisemblablement celle d’un sauveur révéré seulement pour des services temporels. On avait condamné les gnostiques et leurs profanes monumens ; et l’imagination des artistes chrétiens ne pouvait être guidée que par une secrète imitation de quelque modèle du paganisme. Dans cet embarras, on eut recours à une invention hardie autant qu’adroite, et qui établissait à la fois la parfaite ressemblance de l’image, et l’innocence du culte qu’on lui rendait. Une légende de Syrie sur la correspondance de Jésus-Christ et du roi Abgare, fameuse au temps d’Eusèbe, et que des écrivains modernes ont abandonnée avec tant de regret, servit de fondement à une nouvelle fable. L’évêque de Césarée[1] rapporte la lettre d’Abgare à Jésus-Christ[2] ; mais ce

    représentait Jésus-Christ et la pauvre femme qu’il avait guérie d’un flux de sang. (Eusèbe, VII, 18 ; Philostorg., VII, 3, etc.) M. de Beausobre conjecture, avec plus de raison, qu’il s’agissait du philosophe Apollonius ou de l’empereur Vespasien : dans cette dernière supposition, la femme représente une ville, une province, ou peut-être la reine Bérénice. Biblioth. germ., XIII, p. 1-92.

  1. Eusèbe, Hist. ecclésiast., l. I, c. 13. Le savant Assemani y ajoute le témoignage de trois Syriens, de saint Éphrem, de Josué Stylite, et de Jacques, évêque de Sarug ; mais je ne sache pas qu’on ait produit l’original de cette lettre, ou qu’on ait indiqué les archives d’Édesse. (Biblioth. orient., t. I, p. 318, 420, 554) Cette tradition si vague et si incertaine leur venait probablement des Grecs.
  2. Lardner discute et rejette avec sa candeur ordinaire les témoignages cités en faveur de cette correspondance