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mères épouvantaient leurs enfans du terrible nom de Narsès. Il n’est pas hors de vraisemblance que Narsès, né en Perse, encouragea son maître et son ami à délivrer et à envahir les provinces d’Asie ; il est encore plus probable que Chosroès put animer ses soldats par cette assurance que le glaive qu’ils redoutaient le plus demeurerait dans le fourreau ou n’en sortirait qu’en leur faveur. Le héros ne pouvait compter sur la foi d’un tyran ; et le tyran devait sentir combien il méritait peu l’obéissance d’un héros. Narsès fut dépouillé du commandement ; il arbora le drapeau de l’indépendance à Hiérapolis, ville de Syrie ; mais, attiré par de trompeuses promesses, il fut brûlé vif au milieu de Constantinople. Les soldats qu’il avait menés à la victoire, privés du seul général qu’ils pussent craindre ou estimer, furent rompus deux fois par la cavalerie, écrasés sous les pieds des éléphans, et percés par les traits des Barbares ; un grand nombre de captifs furent décapités sur le champ de bataille par ordre du vainqueur, qui pouvait avec justice condamner ces mercenaires séditieux comme les auteurs ou les complices de la mort de Maurice. Sous le règne de Phocas, le monarque de Perse assiégea, réduisit et renversa successivement les fortifications de Merdin, Dara, Amida et Édesse ; il passa l’Euphrate, s’empara d’Hiérapolis, de Chalcis et de Berrhée ou Alep, ville de la Syrie, et environna bientôt les murs d’Antioche de ses irrésistibles armes. Ses rapides succès montrent la décadence de l’empire, l’incapacité de Phocas et le peu d’affection de ses sujets. Un impos-