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tandis qu’il appropriait à l’usage de ses sectaires les domaines les plus fertiles et les femmes les plus belles. Ces désordres, que fomentèrent ses lois et son exemple[1], remplirent d’amertume la vieillesse du monarque de Perse ; et ses craintes étaient augmentées par le sentiment secret du projet qu’il avait formé de changer l’ordre de succession suivi jusque alors en faveur de son troisième fils, celui qu’il aimait le plus, et qui s’est rendu si célèbre sous les noms de Chosroès et de Nushirwan. Pour relever encore ce jeune homme dans l’esprit des peuples, il pria l’empereur Justin de l’adopter. L’espoir de la paix disposait la cour de Byzance à y consentir, et Chosroès allait se procurer un titre spécieux à l’héritage de son père adoptif ; mais le questeur Proclus fit sentir les maux qui pouvaient résulter de ce projet. On éleva une difficulté sur la question de savoir si l’adoption se ferait comme une cérémonie civile ou comme une cérémonie militaire[2]. La négocia-

  1. Il offrit sa femme et sa sœur au prophète ; mais les prières de Nushirwan sauvèrent sa mère ; et le prince indigné, se souvenant toujours de l’humiliation où sa piété filiale l’avait réduit : Pedes tuos deosculatus, dit-il ensuite à Mazdak, cujus fetor adhuc nares occupat. (Pococke, Specimen Hist. Arab., p. 71).
  2. Procope, Persic., l. I, c. 11. Proclus n’eut-il pas trop de prévoyance ? Les dangers qu’il craignait n’étaient-ils pas imaginaires ? L’excuse du moins qu’on adopta était injurieuse à une nation qui savait lire : ο‌υ γραμμασι οι βαρβαροι το‌υς παιδας ποιο‌υνται αλλ’ οπλων σκευη. Je doute beaucoup qu’il y eût des formes d’adoption en Perse.