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de ses contemporains, il excita les Lombards à punir l’ingratitude du prince et du peuple[1]. Mais les passions du peuple sont mobiles autant que furieuses, et les Romains ne tardèrent pas à se rappeler le mérite ou à redouter la colère de leur général victorieux. Ils employèrent la médiation du pape, qui, étant allé trouver Narsès à Naples, lui fit agréer leur repentir, il adoucit la sévérité de son maintien, la fierté de son langage, et consentit à fixer sa résidence au Capitole ; mais quoiqu’il eût atteint le dernier terme de la vieillesse[2], sa mort, arrivée bientôt après, put être regardée comme prématurée ; car son génie seul pouvait réparer la fatale erreur des derniers temps de sa vie. La réalité ou le bruit d’une conspiration désarma et désunit les Italiens.

  1. Les reproches que le diacre Paul (l. II, c. 5) fait à Narsès, peuvent être sans fondement ; mais les meilleurs critiques rejettent la faible apologie qu’a publiée le cardinal Baronius. (Annal. ecclés., A. D. 567, nos 8-12) J’indiquerai parmi ces critiques Pagi (tom. II, p. 639, 640), Muratori (Annal. d’Ital., t. V, p. 160-163), et les derniers éditeurs, Horace Blancus (Script. rer. Italic., t. I, p. 427, 428) et Philippe Argelatus (Sigon., Opera, t. II, p. 11, 12). Il est clair que le Narsès qui assista au couronnement de Justin (Corippe, l. III, 221), était une autre personne du même nom.
  2. Paul (l. II, c. 11), Anastase (in vit. Johan., III, p. 43), Agnellus (Liber pontifical. Raven. in Script. rer. Ital., t. II, part. 1, p. 114-124), font mention de la mort de Narsès. Mais je ne puis croire, avec Agnellus, que ce général fût âgé de quatre-vingt-quinze ans. Est-il probable que l’âge de quatre-vingts ans ait été l’époque de ses exploits ?