Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 8.djvu/235

Cette page a été validée par deux contributeurs.

son pouvoir pour supprimer les textes authentiques où se trouvaient exprimés leurs véritables sentimens. La nécessité de l’uniformité a servi de prétexte pour excuser les changemens et les interpolations de Tribonien et de ses collègues ; mais ces soins ont été insuffisans, et les antinomies ou contradictions du Code et des Pandectes, exercent toujours la patience et la subtilité des jurisconsultes modernes[1].

Perte de l’ancienne jurisprudence.

Les ennemis de Justinien ont répandu un bruit qui n’est appuyé d’aucun témoignage : on prétendit que l’auteur des Pandectes avait brûlé les lois de l’ancienne Rome, dans cette orgueilleuse idée qu’elles étaient devenues inapplicables ou superflues ; sans se charger d’un rôle si odieux, il put confier à l’ignorance et au temps l’accomplissement de ce vœu destructeur. Avant l’invention de l’imprimerie et du papier, les riches seuls pouvaient payer le travail et la matière des manuscrits ; et l’on peut raisonnablement calculer le prix des livres à cette époque à cent

    des faux de cette espèce, a été bien réduit par Bynkershoek (dans les quatre derniers livres de ses Observations), qui soutient, par de bien misérables raisons, le droit qu’avait Justinien de les exiger, et l’obligation où était Tribonien de lui obéir.

  1. Les Antinomies ou lois opposées du Code et des Pandectes, sont quelquefois la cause et souvent l’excuse de la glorieuse incertitude des lois civiles, qui donne lieu fréquemment à ce que Montaigne appelle les questions pour l’ami. Voyez un beau passage de François Balduin sur Justinien, l. II, p. 259, etc., apud Ludewig, p. 305, 306.