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d’un affaiblissement remarquable dans les rayons du soleil. Les chroniques de l’Europe et de la Chine rapportent la sixième à l’année 1105 ; et comme on éprouvait alors la première ferveur des croisades, les chrétiens et les musulmans purent imaginer, avec autant de raison les uns que les autres, qu’elle annonçait la destruction des infidèles. Ce fut en 1680, dans un âge éclairé, qu’eut lieu la septième apparition[1]. Le philosophe Bayle dissipa ce préjugé récemment embelli par la muse de Milton[2], que la comète « de son affreuse chevelure secoue la peste et la guerre. » Flamstead et Cassini observèrent sa route dans les cieux avec une intelligence admirable ; et Bernoulli, Newton et Halley cherchèrent les lois de ses révolutions. Lorsqu’en 2255 elle reparaîtra pour la huitième fois, leurs calculs seront peut-être vérifiés par les astronomes de quelque capitale élevée

  1. Cette dernière comète parut au mois de décembre 1680. Bayle, qui commença ses Pensées sur la comète au mois de janvier 1681 (Œuvres, t. III), fut obligé de se servir de cet argument qu’une comète surnaturelle aurait confirmé les anciens dans leur idolâtrie. Bernoulli (voyez son Éloge dans Fontenelle, t. V, p. 99) disait encore que la tête de la comète n’est pas un signe extraordinaire de la colère du ciel, mais que la queue en est peut-être un.
  2. Le Paradis perdu fut publié l’an 1667 ; et les fameux vers (l. II, 708, etc.) qui étonnèrent le censeur, pouvaient faire allusion à la comète de 1664, observée à Rome par Cassini, en présence de la reine Christine. Fontenelle (Éloge de Cassini, t. V, p. 338). Charles II avait-il laissé apercevoir quelques symptômes de curiosité ou de frayeur ?