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une obole au général Bélisaire. » C’est une fiction des temps postérieurs adoptée avec confiance ou plutôt avec intérêt, comme un étrange exemple des vicissitudes de la fortune[1].

Mort et caractère de Justinien. A. D. 565, 4 nov.

Si l’empereur fut capable de se féliciter de la mort de Bélisaire, il ne jouit de cette lâche satisfaction que pendant huit mois, dernière période d’un règne de trente-huit ans et d’une vie de quatre-vingt-trois. Il serait difficile de tracer le caractère d’un prince qui n’est pas l’objet le plus remarquable de son temps ; mais les aveux de Procope, son ennemi, peuvent être regardés comme le plus incontestable témoignage des vertus qu’il lui accorde. Il remarque malignement la ressemblance de ce prince avec le buste de Domitien[2] ; mais en lui accordant cependant une

    Chroniques que Bélisaire ne perdit pas la vue, et qu’il recouvra sa réputation et sa fortune.

  1. La villa Borghèse à Rome, offre une statue qui représente un homme assis et tendant la main, et connu vulgairement sous le nom de Bélisaire. Une explication plus noble et plus probable donne lieu de croire qu’elle représente Auguste cherchant à se rendre Némésis favorable. (Winckelman, Hist. de l’Art, t. III, p. 266.) Ex nocturno visu etiam stipem, quotannis, die certo, emendicabat à populo, cavam manum asses porrigentibus prœbens. (Suétone, in August., c. 91, avec une excellente note de Casaubon.)
  2. Tacite (in vit. Agricolæ, c. 46) jette finement de l’odieux sur le rubor de Domitien. Pline-le-Jeune (Panégyr., c. 48), et Suétone (in Domitianum, c. 18 et Casaubon ad locum) le remarquent également. Procope (Anecd., c. 8) croit ridiculement qu’au sixième siècle il ne restait qu’un seul buste de Domitien.