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postérité ; mais le crime ou le mérite de ces assassins, révoltés ou fidèles à leur prince, ne pouvaient intéresser que les contemporains de Procope, que l’amitié ou le ressentiment, l’espérance ou la crainte, avaient personnellement engagés dans les révolutions de l’Afrique[1].

Rebellion des Maures. A. D. 543-558.

Ce pays retombait rapidement dans l’état de barbarie d’où l’avaient tiré les colonies phéniciennes et les lois de Rome ; et chaque degré de la discorde intestine était marqué par quelque déplorable victoire de l’homme sauvage sur la société civilisée. Les Maures[2] ne connaissaient pas les lois de la justice, mais ils ne pouvaient supporter l’oppression. Leur vie errante et leurs immenses déserts trompaient les armes ou éludaient les chaînes d’un conquérant ; et l’expérience prouvait assez qu’on ne devait compter ni sur leurs sermens, ni sur leur reconnaissance. Effrayés par la victoire du mont Aurasius, ils s’étaient momentanément soumis ; mais s’ils respectaient le caractère de Salomon, ils détestaient et méprisaient

  1. Toutefois je ne dois pas refuser à Procope le mérite de peindre, d’une manière animée, l’assassinat de Gontharis. L’un des meurtriers montra des sentimens dignes d’un patriote romain. « Si je tombe d’un premier coup, dit Artasires, tuez-moi sur-le-champ, de peur que les douleurs de la torture ne m’arrachent l’aveu de mes complices. »
  2. Procope, dans le cours de sa narration, parle quelquefois des guerres contre les Maures (Vandal., l. II, c. 19, 23, 25, 27, 28 ; Gothic., l. IV, c. 17), et Théodat nous instruit de plus de quelques succès et de quelques revers dont la date se rapporte aux dernières années de Justinien.