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toutes parts son trône et son pays ; et il est peut-être injuste de blâmer ce prince d’avoir choisi pour alliés ceux de ces Barbares qui, par leurs forces navales, pouvaient être ses plus dangereux ennemis, ou ses amis les plus utiles. Hengist et Horsa, comme ils rangeaient la côte orientale de l’île avec trois vaisseaux, furent invités, par la promesse d’une ample récompense, à entreprendre la défense de la Bretagne ; et leur intrépidité la délivra bientôt des usurpateurs de la Calédonie. Ces Germains auxiliaires obtinrent dans l’île de Thanet une résidence tranquille et un district fertile. On leur fournit suivant le traité une abondante provision de vêtemens et de subsistances. Cette réception favorable attira cinq mille nouveaux guerriers avec leurs familles ; ils arrivèrent dans dix-sept vaisseaux, et la puissance naissante d’Hengist se trouva consolidée par ce renfort. Vortigern se laissa persuader par le rusé Barbare, qu’il lui serait avantageux d’établir une colonie d’alliés fidèles dans le voisinage des Pictes ; et une troisième flotte, composée de quarante vaisseaux, partit des côtes de la Germanie, sous la conduite du fils et du neveu d’Hengist, ravagea les Orcades, et débarqua sur la côte de Northumberland ou Lothian, à l’extrémité opposée de la contrée désormais dévouée à leur rapacité. Il était aisé de prévoir, mais impossible de prévenir les malheurs qui devaient en résulter. Des inquiétudes mutuelles divisèrent et aigrirent bientôt les deux nations ; les Saxons exagérèrent leurs services, et ce qu’ils avaient souffert pour