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Syracuse, Constantin s’avisa de dire qu’il aurait puni une femme adultère plutôt que le jeune homme. Antonina n’oublia jamais ce mot imprudent autant que juste ; et deux ans après, lorsque le désespoir eut armé cet officier contre son général, ce fut elle qui conseilla et hâta sa mort. Elle ne pardonna pas même à l’indignation de Photius son fils ; elle prépara par l’exil de ce fils le rappel de son amant ; et Théodose daigna se rendre aux humbles et pressantes invitations du vainqueur de l’Italie. Le jeune favori gouvernant la maison de Bélisaire et ayant obtenu des commissions importantes dans la paix et dans la guerre[1], acquit bientôt une fortune de quatre cent mille livres sterling ; et après son retour à Constantinople, la passion d’Antonina conserva la même vivacité. La crainte, la dévotion, peut-être la satiété, inspirèrent à Théodose des pensées plus sérieuses ; il craignit les propos de la capitale, et l’indiscrète ardeur de la femme de Bélisaire ; pour éviter ses caresses, il se retira à Éphèse, y fit couper sa chevelure, et embrassa la vie monastique. La nouvelle Ariane montra un désespoir que la mort de son mari aurait à peine justifié. Elle versa des larmes, elle s’arracha les cheveux, elle remplit le palais de ses cris ; elle ne cessait de répéter « qu’elle avait perdu le plus cher de ses amis, un ami tendre, fidèle,

  1. Au mois de novembre 537, Photius arrêta le pape. Libérat. Brev., c. 22 ; Pagi, t. II, p. 562. Vers la fin de l’année 539, Bélisaire donna à Théodose, τον τῃ οικια τῃ αυτο‌υ εφεσ‌τωτα, une commission importante et lucrative à Ravenne.