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qu’il pressait le blocus de Ravenne, il vit avec surprise deux ambassadeurs arriver de Constantinople apportant un traité de paix que Justinien avait imprudemment signé sans daigner consulter le général à qui il devait ses victoires. Ce traité, par un arrangement honteux et précaire, partageait l’Italie et le trésor des Goths, et laissait au successeur de Théodoric, avec le titre de roi, les provinces situées au-delà du . Les ambassadeurs se hâtèrent avec ardeur d’accomplir une mission si salutaire : Vitigès, presque captif, reçut avec transport l’offre inattendue d’une couronne : les Goths se montrèrent moins sensibles à l’honneur qu’à la faim ; et les chefs romains, qui murmuraient de la durée de la guerre, exprimèrent la plus parfaite soumission aux ordres de l’empereur. Si Bélisaire n’avait eu que le courage d’un soldat, des conseils timides et jaloux auraient arraché le laurier de ses mains ; mais dans cet instant décisif, il résolut, avec la grandeur d’âme d’un véritable homme d’état, de courir seul le danger et de recueillir seul la gloire d’une généreuse désobéissance. Ce fut après que chacun de ses officiers eut déclaré par écrit que le siége de Ravenne était impraticable, qu’il rejeta le traité de partage, et déclara sa résolution de conduire Vitigès, chargé de chaînes, aux pieds de Justinien. Les Goths se retirèrent pleins de trouble et de consternation : ce refus

    tacite ou expresse, qui interdirait réciproquement certaines méthodes d’hostilité. Voy. le Serment amphyctionique dans Eschine, De falsâ legatione.