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violence fit oublier le crime de Constantin : on imputa secrètement à la vengeance d’Antonina, le désespoir et la mort de ce brave officier ; et ses collègues, coupables des mêmes brigandages, commencèrent à redouter le même sort. L’épouvante causée par les Barbares, suspendit l’effet de leur jalousie et de leur mécontentement ; mais lorsqu’ils se virent sur le point de triompher des Goths, ils excitèrent un puissant rival à s’opposer au conquérant de Rome et de l’Afrique. [L’eunuque Narsès.]L’eunuque Narsès, du service domestique du palais et de l’administration du revenu privé de l’empereur, était parvenu tout à coup au rang de général ; et ses qualités héroïques qui, pour le mérite et pour la gloire, l’égalèrent ensuite à Bélisaire, ne firent alors qu’embarrasser les opérations de la guerre des Goths. Les chefs de la faction des mécontens attribuèrent à ses conseils le salut de Rimini, et l’exhortèrent à prendre un commandement séparé et indépendant. La lettre de Justinien lui enjoignait, il est vrai, d’obéir au général ; mais elle ajoutait ; « Autant que cela pourra être avantageux au service public ; » et cette dangereuse restriction laissait quelque liberté de jugement au favori prudent qui venait de quitter Constantinople, la présence sacrée et la conversation familière de son souverain. D’après ce droit incertain, Narsès se montra constamment d’une opinion opposée à celle de Bélisaire ; et après avoir consenti avec répugnance au siége d’Urbin, il abandonna son collègue pendant la nuit, et alla conquérir la province Émilienne. Les fa-