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on établit sur le courant de la rivière de gros navires auxquels on adapta des meules de moulin. Son lit fut ensuite embarrassé de troncs d’arbres et souillé de cadavres ; toutefois les précautions de Bélisaire furent si heureuses, que les eaux du Tibre continuèrent à tenir les moulins en activité et à fournir une boisson aux habitans ; les puits étaient une ressource pour les quartiers éloignés, et une ville assiégée pouvait souffrir sans impatience la privation des bains publics. Une partie considérable de Rome, celle qui s’étend depuis la porte de Preneste jusqu’à l’église de saint Paul, ne fut jamais investie par les Goths ; l’activité des Maures réprima leurs excursions : la navigation du Tibre, la voie Latine, les voies Appienne et Ostienne demeuraient libres ; on introduisit par là dans la place du bétail et des grains ; et c’est par là que se retirèrent ceux des habitans qui cherchèrent un asile dans la Campanie ou la Sicile. Bélisaire voulant se débarrasser d’une multitude qui ne servait qu’à affamer la place, fit sortir les femmes, les enfans et les esclaves ; il ordonna à ses soldats de renvoyer toutes les personnes des deux sexes qui se trouvaient à leur suite, et déclara qu’on leur donnerait en nature la moitié de leur ration, et le reste en argent. Du moment où les Goths eurent occupé deux postes importans situés aux environs des murs, la détresse qui en fut la suite justifia bien sa prévoyance. La perte du port, ou comme on l’appelle maintenant, de la ville de Porto, le priva des ressources du pays qui était à la droite du Tibre, et