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ment gardées : l’espoir de la victoire et du butin animait les Goths ; et si un seul poste eût cédé, les Romains et Rome elle-même étaient perdus. Cette journée si périlleuse fut la plus glorieuse de la vie de Bélisaire. Au milieu du tumulte et de l’effroi général, il ne perdit pas un moment de vue le plan de l’attaque et de la défense, observa toutes les vicissitudes de l’assaut, calcula tous les avantages possibles, se porta dans tous les endroits où il y avait du péril, et ses ordres calmes et décisifs donnaient du courage à ses soldats. On se battit opiniâtrement depuis le matin jusqu’au soir : les Goths furent repoussés de toutes parts ; et si le mérite du général n’eût pas contre-balancé la disproportion qui se trouvait entre le nombre des assaillans et celui des assiégés, chaque Romain eût pu se glorifier d’avoir vaincu trente Barbares. Les chefs des Goths avouèrent que cette action meurtrière avait coûté la vie à trente mille de leurs soldats, et il y en eut un pareil nombre de blessés. Lorsqu’ils avaient commencé l’attaque, dans cette foule tumultueuse, aucun des traits des Romains n’avait pu tomber sans effet ; et quand ils se retirèrent, la populace de la ville se joignit aux vainqueurs, et chargea sans danger le dos des fuyards. [Ses sorties.]Bélisaire au même instant sortit des portes ; ses soldats, en chantant son nom et sa victoire, réduisirent en cendres les machines de l’ennemi. La perte et la consternation des Goths furent telles, que depuis cette journée le siége de Rome dégénéra en un languissant et ennuyeux blo-