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l’armée, avaient longé la côte avec précaution jusqu’au promontoire d’Hermé, où ils apprirent les premières nouvelles de la victoire de Bélisaire. Les capitaines, fidèles à ses instructions, allaient mouiller à environ vingt milles de Carthage, lorsque d’habiles marins les avertirent des dangers de la côte et des indices d’une tempête. Ignorant toujours la révolution, ils ne voulurent point entreprendre de forcer la chaîne du port, ainsi qu’on le leur proposait ; et le port et le faubourg de Mandracium furent seuls exposés à quelques insultes de la part d’un officier inférieur qui se sépara de ses chefs et agit contre leurs ordres. Le reste de la flotte profita d’un bon vent, et après avoir atteint l’étroite ouverture de la Goulette[1], jeta l’ancre dans le profond et vaste lac de Tunis, c’est-à-dire à environ cinq milles de la capitale. Aussitôt que Bélisaire fut instruit de son arrivée, il envoya l’ordre de faire descendre à terre sur-le-champ la plus grande partie des mariniers, afin qu’ils vinssent assister à son triomphe, et grossir le nombre des Romains. Avant de leur permettre de

  1. La mer, la terre, les rivières, toutes les parties des environs de Carthage sont presque aussi changés que le peuvent être les travaux des hommes. On ne distingue plus aujourd’hui du continent l’isthme sur lequel était bâti la ville ; le havre est une plaine desséchée, et le lac ou stagnum n’offre plus qu’un marais coupé par un courant d’eau de six ou sept pieds de profondeur. Voyez d’Anville, Géogr. anc., t. III, p. 82 ; Shaw, Travels, p. 77-84 ; Marmol, Description de l’Afrique, t. II, p. 465 ; et de Thou, LVIII, 12, t. III, p. 334.