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verait du secours et même de la vue de leur flotte ; mais la témérité d’Ammatas lui devint funeste ainsi qu’à son pays. Ayant devancé l’heure de l’attaque, il laissa derrière lui ses compagnons trop lents, et reçut une blessure mortelle après avoir tué de sa main douze des plus braves soldats ennemis. Sa troupe s’enfuit vers Carthage ; le chemin était jonché de morts dans un espace de dix milles, et on avait peine à comprendre que trois cents Romains eussent massacré tant de monde. Les six cents Massagètes mirent en déroute, après un léger combat, le corps du neveu de Gelimer, trois fois plus considérable que le leur ; chaque Scythe était animé par l’exemple de son chef, qui, usant du glorieux privilége de sa famille, s’était porté seul en avant pour décocher le premier trait contre l’ennemi. Sur ces entrefaites, Gelimer ignorant son malheur, et égaré au milieu des détours sinueux des collines, dépassa l’armée romaine sans le savoir, et arriva sur le terrain où venait d’expirer l’imprudent Ammatas. Il pleura la destinée de son frère et celle de Carthage, et chargea avec l’intrépidité du désespoir les escadrons qui s’avançaient à sa rencontre ; il aurait pu pousser plus loin ses avantages et peut-être décider la victoire en sa faveur, s’il n’eût perdu un temps inestimable à rendre aux morts de pieux mais vains devoirs. Au milieu de ces tristes soins qui abattaient son courage, la trompette de Bélisaire vint frapper ses oreilles. Le général romain, laissant Antonina et son infanterie dans son camp, s’avançait à la tête de ses gardes et du reste