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On eut l’adresse d’exciter contre lui les habitans et surtout la faction des Bleus, et même de lui faire un crime de son zèle pour la religion. L’empereur et son neveu l’accueillirent comme le fidèle champion de l’Église et de l’État ; ils lui donnèrent d’un air reconnaissant les titres de consul et de général ; mais le septième mois de son consulat, il fut percé de dix-sept coups à la table du prince[1] ; et Justinien, qui hérita de sa dépouille, fut accusé, par l’opinion publique, du meurtre d’un homme de la même communion que lui, auquel il avait récemment engagé sa foi en participant avec lui aux saints mystères[2]. Après la chute de son rival, Justinien fut élevé, sans l’avoir mérité par aucun service militaire, au grade de maître général des armées d’Orient, à la tête desquelles il devait, en cette qualité, marcher contre les ennemis de l’état ; mais en courant après la gloire, Justinien s’exposait à perdre, par son absence, l’empire que lui donnaient sur son oncle l’âge et la faiblesse de celui-ci ; et au lieu de

  1. Le comte du Buat (t. IX, p. 54-81) explique très-bien la puissance, le caractère et les intentions de Vitalien. Il était arrière-petit-fils d’Aspar, prince héréditaire de la Scythie mineure, et comte des Goths confédérés de la Thrace. Les Bessi, sur lesquels il avait de l’influence, sont les Gothi minores de Jornandès, c. 51.
  2. Justiniani patricii factione dicitur interfectus fuisse. Victor Tunnunensis, Chron. in Thes. temp. ; Scaliger, part. II, p. 7 ; Procope (Anecd., c. 7) l’appelle un tyran ; mais il avoue l’αδελφοπισ‌τια, qui est bien expliqué par Alemannus.