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desseins du patrice romain[1]. On doit présumer son innocence, puisque Théodoric lui ôta les moyens de se justifier, et le tint resserré dans la tour de Pavie, tandis qu’à cinq cents milles de là, le sénat prononçait un arrêt de confiscation et de mort contre le plus illustre de ses membres. Par les ordres d’un Barbare, les connaissances secrètes d’un philosophe furent flétries des noms de sacrilége et de magie[2]. La voix tremblante des sénateurs eux-mêmes punit son fidèle attachement au sénat ; Boëce leur promit qu’après lui personne ne se rendrait coupable du même crime, et leur ingratitude mérita ce vœu ou cette prédiction[3].

Son emprisonnement et sa mort. A. D. 524.

Tandis que Boëce, chargé de fers, attendait de

  1. On trouve dans les lettres de Cassiodore sur le caractère des deux délateurs de Boëce, Basilius (Variar., II, 10, 11 ; IV, 22) et Opilio (V, 41 ; VIII, 16), des éclaircissemens qui leur sont peu honorables. Elles font aussi mention (V, 31) de Decoratus, l’indigne collègue de Boëce (l. III, Pros. 4, p. 193).
  2. On ordonna des recherches sévères sur le crime de magie (Variar., IV, 22, 23 ; IX, 18) : on prétendit que plusieurs nécromanciens, pour s’échapper, avaient rendu fous leurs geôliers. Au lieu de fous, je serais tenté de lire ivres.
  3. Boëce avait composé son apologie (p. 53), qui serait peut-être plus intéressante que sa Consolation. Il faut nous contenter de la revue qu’il fait de ses dignités, de ses principes, de sa persécution, etc. (l. I, Pros. 4, p. 42-62), et on peut la rapprocher des mots concis, mais énergiques, du Fragment de Valois, p. 723. Un auteur anonyme (Sinner, Catalog. Mss., Bill. Bern., t. I, p. 287) l’accuse d’un crime honorable et patriotique de lèse-majesté.