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adopter les mœurs féroces qu’abandonnaient peu à peu les Barbares enrichis et amollis par le luxe[1] ; [Séparation des Goths et des Italiens.]mais ces conversions mutuelles n'étaient pas encouragées par un monarque qui voulait maintenir la séparation des Italiens et des Goths et réserver les premiers pour les arts de la paix, et les seconds pour le service de la guerre. Afin d’arriver à ce but, il eut soin de protéger l’industrie de ses sujets, et de modérer la violence de ses guerriers, sans énerver leur valeur. Les terres de ceux-ci étaient des bénéfices militaires qui leur tenaient lieu de solde : dès que la trompette les appelait, ils marchaient sous la conduite des officiers qui commandaient dans les provinces ; et l’Italie ne formait dans toute son étendue que divers quartiers d’un camp bien réglé. Les troupes faisaient chacune à leur tour, ou d’après le choix du souverain, le service du palais et celui des frontières ; et toutes les fatigues extraordinaires étaient suivies d’un accroissement de solde ou d’une gratification. Théodoric avait fait comprendre à ses braves compagnons qu’ils devaient défendre l’empire par les moyens employés pour le conquérir. Ils tâchèrent, à son exemple, d’exceller dans l’usage non-seulement de la lance et de l’épée, instrumens de leur victoire, mais des armes de trait qu’ils étaient trop disposés à négliger ; l’exercice journalier, et les revues annuelles de la cavalerie des Goths, présentaient le

  1. Théodoric disait avec raison : Romanus miser imitatur Gothum ; et utilis (dives) Gothus imitatur Romanum. Voy. le Fragment et les notes de Valois, p. 719.