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et de la Perse, qui négligeaient et négligent encore de suppléer à ces avantages naturels par les ressources de l’art militaire. Les nations guerrières de l’antiquité, de la Grèce, de la Macédoine et de Rome, élevaient une race de soldats, exerçaient leurs corps, disciplinaient leur courage, multipliaient leurs forces par des évolutions régulières, et convertissaient le fer, production de leurs climats, en armes utiles pour l’attaque et pour la défense ; mais la corruption de leurs mœurs et de leurs lois fit insensiblement disparaître cette supériorité. La politique faible de Constantin et de ses successeurs arma et instruisit la valeur indisciplinée des mercenaires Barbares qui renversèrent l’empire. L’invention de la poudre a produit une grande révolution dans l’art militaire, en soumettant au pouvoir de l’homme l’air et le feu, les deux plus redoutables agens de la nature. Les mathématiques, la chimie, la mécanique et l’architecture ont appliqué leurs découvertes au service de la guerre ; et les combattans emploient aujourd’hui, pour l’attaque et la défense, les méthodes les plus savantes et les plus compliquées. Les historiens peuvent observer avec indignation que les préparatifs d’un siége établiraient et entretiendraient une colonie florissante[1] ; on n’en regardera pas moins

  1. On avait fait venir (pour le siége de Turin) cent quarante pièces de canon, et il est à remarquer que chaque gros canon monté revient environ à deux mille écus ; il y avait cent dix mille boulets, cent six mille cartouches d’une espèce, et trois cent mille d’une autre ; vingt-un mille bombes,