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veuve du préfet Petronius. Après la mort de son mari, le plus puissant des sujets de Rome, elle était demeurée à la tête de la famille Anicienne, et avait défrayé de sa fortune particulière les dépenses des consulats de ses trois fils. Lorsque les Goths assiégèrent et emportèrent la capitale, Proba, supportant avec une résignation chrétienne la perte de ses immenses richesses, s’embarqua dans un petit vaisseau, d’où elle vit, en naviguant, les flammes qui consumaient son magnifique palais. Elle se réfugia sur la côte d’Afrique, accompagnée de sa fille Lœta et de sa petite-fille, vierge célèbre, connue sous le nom de Demetrias. La générosité avec laquelle cette respectable matrone distribua les revenus et le prix de ses domaines, adoucit l’infortune des exilés et des captifs ; mais la famille même de Proba ne fut point à l’abri de l’avide oppression du comte Héraclien, qui, par un honteux trafic, prostituait aux désirs ou aux vues intéressées des marchands de Syrie l’alliance des plus nobles filles des familles romaines. Les Italiens fugitifs se dispersèrent dans les provinces le long des côtes de l’Égypte et de l’Asie, jusqu’à Constantinople et Jérusalem ; et le village de Bethléem, la résidence solitaire de saint Jérôme et de ses nouvelles converties, se trouva rempli d’illustres mendians des deux sexes et

    (t. I, p. 62-73, ad Demetriad. de servanda virginitat.). C’est un mélange de raisonnemens absurdes, de déclamations véhémentes et de faits assez curieux, dont quelques-uns sont relatifs au siége et au pillage de Rome.