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beaucoup plus utile que les esclaves, ils fixèrent la rançon de leurs prisonniers indigens à un prix modique souvent payé par leurs amis ou par la bienfaisance des étrangers[1]. Les captifs vendus en plein marché ou par convention particulière, auraient pu reprendre légalement leur liberté, qu’un citoyen ne pouvait ni perdre ni aliéner[2] ; mais on sentit bientôt qu’en usant de ce droit, les Romains courraient risque de leur vie, et que les Goths, en perdant l’espoir de vendre des prisonniers qui leur étaient inutiles, pourraient être tentés de les massacrer. Un règlement sage dans la circonstance avait déjà modifié la jurisprudence civile, en ordonnant qu’ils seraient esclaves durant cinq ans pour acquitter, par leurs travaux, le prix de leur rançon[3]. Les nations qui envahirent l’empire romain avaient chassé devant elles, en Italie, une multitude d’habitans de provinces affamés et tremblans, et redoutant plus la famine que l’esclavage. Les calamités de Rome et de l’Italie firent chercher à leurs habitans les refuges les plus sûrs, les plus éloignés et les plus solitaires. Tandis que la cavalerie des Goths répan-

  1. Multi… Christiani in captivitatem ducti sunt, saint Augustin (De Civit. Dei, l. I, c. 14) ; et les chrétiens ne furent pas plus maltraités que les autres.
  2. Voyez Heineccius, Antiq. juris roman., t. I, p. 96.
  3. Appendix, Cod. Theod., XVI ; in Sirmond, opera, t. I, p. 735. Cet édit fut publié le 11 décembre, A. D. 408, et annonce plus de sagesse qu’on ne pouvait en attendre des ministres d’Honorius.