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zèle ; ils faisaient avec une fureur religieuse le métier d’espions, de délateurs et de bourreaux ; et lorsque leur cavalerie entrait en campagne, un de leurs amusemens favoris, pendant la marche, était de souiller les églises et d’insulter le clergé des catholiques[1]. 4o. Par un raffinement de cruauté, on livrait aux Maures du désert des citoyens accoutumés au luxe des provinces romaines. Hunneric fit arracher de leur demeure et chasser en grand nombre de leur pays natal de vénérables évêques, prêtres et diacres, suivis d’une troupe fidèle de quatre mille quatre-vingt-seize personnes, dont le crime n’est pas bien connu. Durant la nuit, on les entassait, s’il est permis de le dire, comme un troupeau, dans leur propre ordure : dans le jour, ils continuaient leur marche à travers les sables brûlans du désert ; et lorsque épuisés de chaleur et de fatigue, ils s’arrêtaient ou ralentissaient leur marche, on les chassait à coups de fouet, ou on les traînait jusqu’à ce qu’ils expirassent entre les mains de leurs persécuteurs[2]. Lorsque ces malheureux exilés atteignirent les huttes des Maures, ils excitèrent sans doute la compassion d’un peuple dont l’humanité, si elle n’était pas per-

  1. Voyez Procope, De bell. vand., l. I, c. 7, p. 197, 198. Un prince maure s’efforça de s’attirer la faveur du dieu des chrétiens, par son zèle à effacer les traces des sacrilèges commis par les Vandales.
  2. Voyez cette histoire dans Victor, II, 8-12, p. 30-34. Victor raconte les souffrances de ces confesseurs comme en ayant été le témoin oculaire.