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gnation que de surprise, qu’ils n’avaient fait que changer de manière de se précipiter dans la damnation éternelle. Au lieu de ces douces louanges que les rois chrétiens ont coutume d’attendre de leurs fidèles évêques, les prélats orthodoxes et leur clergé étaient toujours en contestation avec les cours ariennes. Leurs oppositions indiscrètes devenaient souvent criminelles, et quelquefois dangereuses[1]. Les chaires, organes privilégiés de la sédition, retentissaient des noms de Pharaon et d’Holopherne[2]. L’espérance ou la promesse d’une délivrance glorieuse enflammait le ressentiment du peuple, et les prélats séditieux ne pouvaient se défendre de travailler quelquefois eux-mêmes aux succès de leurs prédictions. Malgré ces provocations, les catholiques de l’Espagne, de la Gaule et de l’Italie, conservèrent, sous le règne des ariens, le libre et paisible exercice de leur religion. Ces maîtres orgueilleux respectèrent le zèle d’un peuple nombreux, déterminé à mourir au pied de ses autels, et les Barbares eux-mêmes admirèrent et imitèrent la fermeté de leur dévotion. Les vainqueurs, pour se sauver la honte

  1. Les épîtres de Sidonius, évêque de Clermont sous les Visigoths, et d’Avitus, évêque de Vienne sous les Bourguignons, font connaître en quelques endroits d’une manière détournée la disposition générale des catholiques. L’histoire de Clovis et de Théodoric fournira quelques faits particuliers.
  2. Genseric semble confesser la justesse de la comparaison, par la rigueur avec laquelle il punit ces allusions indiscrètes. (Victor Vitensis, I, 7, p. 10).