Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 6.djvu/500

Cette page a été validée par deux contributeurs.

dissensions civiles troublèrent bientôt la paix de l’Église des Goths, et les chefs, divisés par l’intérêt, le furent aussi par la religion. Fritigern, l’allié des Romains, devint le prosélyte d’Ulphilas, et le fougueux Athanaric rejeta l’alliance de l’empire et le joug de l’Évangile. La persécution qu’il excita servit à éprouver la foi des nouveaux convertis. Une image informe, qui était peut-être celle de Thor ou de Wodin, fut promenée sur un chariot dans toutes les rues du camp, et l’on brûla avec leurs tentes et leurs familles ceux qui refusèrent d’adorer le Dieu de leurs ancêtres. Le mérite d’Ulphilas lui acquit l’estime de la cour d’Orient, où il parut deux fois comme ministre de paix. Il plaida la cause des Goths, qui, dans leur détresse, imploraient la protection de Valens ; et l’on donna le surnom de Moïse à ce guide spirituel qui conduisit son peuple à travers les eaux du Danube à la terre de promission[1]. Les pâtres, attachés à sa personne et dociles à sa voix, acceptèrent l’établissement qui leur était offert au pied

    duction des quatre Évangiles dans la langue gothique, et on la regarde comme le plus ancien monument de la langue teutonique, quoique Wetstein entreprenne, sur des conjectures frivoles, d’enlever à Ulphilas le mérite d’avoir composé cet ouvrage. Deux des quatre lettres expriment l’une le W et l’autre le th des Anglais. Voyez Simon., Hist. crit. du Nouv. Testam., t. II, p. 219-223 ; Mill. Prolegom., p. 151, édit. Kuster, Wetstein, Prolegom., t. I, p. 114.

  1. Philostorgius place mal à propos ce passage sous le règne de Constantin ; mais j’ai du penchant à croire qu’il précéda la grande émigration.