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Population de Rome.

On prétend qu’Élagabale eut l’extravagance de vouloir juger du nombre des habitans de Rome par la quantité des toiles d’araignées. Il eût été digne des plus sages empereurs d’employer à cette recherche des moyens moins ridicules. Ils auraient pu facilement résoudre une question si importante pour le gouvernement romain, si intéressante pour la postérité. On enregistrait exactement la mort et la naissance de tous les habitans ; et si quelqu’un des écrivains de l’antiquité avait daigné nous conserver le résultat de ces listes annuelles ou simplement celui de l’année commune, nous pourrions présenter un calcul satisfaisant qui détruirait probablement les assertions exagérées des critiques, et confirmerait peut-être les conjectures plus modérées et plus probables des philosophes[1]. Les recherches les plus exactes à ce sujet n’ont pu fournir que les faits suivans, qui, bien qu’insuffisans, peuvent cependant jeter quelque jour sur la question de la population de l’ancienne Rome. 1o. Lorsque la capitale de l’empire fut assiégée par les Goths, le mathématicien Ammonius mesura exactement l’enceinte de Rome, et trouva que la circonférence était de vingt-un

  1. Lipse (t. III, p. 423, De magnitudine romanâ, l. III, c. 3) et Isaac Vossius (Observat. Var., p. 26-34) adoptent l’étrange idée de quatre, huit et même quatorze millions d’habitans à Rome. M. Hume, dans ses Essais (volume I, p. 450-457), montre, avec une raison et un bon sens de scepticisme admirable, une disposition secrète à rabaisser la population des anciens temps.