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moines égyptiens consistait dans une obéissance aveugle pour leur abbé, quelque absurdes ou même quelque criminels que pussent être ses ordres. Il exerçait souvent leur patience par les épreuves les plus extravagantes : on leur faisait déplacer des roches énormes, arroser assidûment pendant trois ans un bâton planté en terre, qui, au bout de ce temps, devait pousser des racines et produire une tige ; marcher sur des brasiers ardens, ou jeter leurs enfans dans un bassin profond. Un grand nombre de saints ou d’insensés se sont immortalisés dans l’histoire du monachisme par cette soumission, exempte de crainte ou dépourvue de réflexion[1]. L’habitude de l’obéissance et de la crédulité détruisait la liberté de l’âme, source de tous les sentimens raisonnables ou généreux ; et le moine contractant tous les vices de l’esclavage, se dévoua sans réserve à la croyance et aux passions de son tyran ecclésiastique. La paix de l’Église d’Orient fut continuellement troublée par des troupes de fanatiques, aussi incapables de crainte que dépourvus de raison et d’humanité ; et les légions impériales ne rougissaient pas d’avouer quelles re-

    de cet effort, lui pardonner sa défense de la sainte larme de Vendôme, p. 361-399).

  1. Sulpice-Sévère, Dialog., I, 12, 13, p. 532, etc. ; Cassien, Instit., l. IV, c. 26, 27. Præcipua ibi virtus et prima est obedientia. Parmi les verba signorum (in vit. Patr., l. V, p. 617), le quatorzième discours traite de l’obéissance ; et le jésuite Rosweyde, qui publia cet énorme volume pour l’usage des couvens, a rassemblé dans ses deux considérables index tous les passages épars.