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imparfaite et relâchée. Le prince, le magistrat, le militaire et le marchand accommodaient leur foi et leur zèle à l’exercice de leurs professions, à leurs intérêts ou à leurs passions ; mais les ascétiques, qui suivaient à la rigueur les principes de l’Évangile dont ils abusaient, se représentaient dans leur enthousiasme sauvage l’homme comme un criminel, et Dieu comme son tyran. Ils renonçaient aux affaires et aux plaisirs, s’interdisaient l’usage du vin, de la viande et l’union légitime des deux sexes ; mortifiaient leur corps et leurs affections, et faisaient d’une vie de misères le prix auquel ils espéraient obtenir une félicité éternelle. Sous le règne de Constantin, les ascétiques se retirèrent d’un monde profane et corrompu pour vivre solitaires ou former des sociétés religieuses[1]. À l’exemple des premiers chrétiens de Jérusalem, ils abandonnèrent l’usage ou la propriété de leurs possessions temporelles, instituèrent pour chaque sexe des communautés régulières et formées sur un même modèle, et prirent les noms d’ermites, de moines ou d’anachorètes, propres à désigner leur vie retirée et le choix qu’ils faisaient

    édit. græc. Rob. Stephani, Paris, 1545) dans son Histoire ecclésiastique, publiée douze ans après la Démonstration. Eusèbe (l. II, c. 17) défend le christianisme des thérapeutes ; mais il semble ignorer qu’il y avait alors une institution semblable dans l’Égypte.

  1. Cassien (Collat., XVIII, 5) rapporte l’origine des cénobites à cette institution, qui dégénéra insensiblement jusqu’au moment où elle fut rétablie par saint Antoine et par ses disciples.