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mais il aperçut avant la fin de l’année, qu’un rebelle est presque toujours, tôt ou tard, la victime des leçons d’ingratitude et de perfidie qu’il a données, et que le souverain précaire de l’Italie ne pouvait conserver son titre ou sa vie que par une obéissance servile pour ses tyrans mercenaires. La dangereuse alliance des Barbares avait anéanti les faibles restes de la grandeur et de la liberté des Romains. À chaque révolution ils obtenaient une augmentation de paye et de nouveaux priviléges ; mais leur insolence parvint à un degré encore plus extravagant. Jaloux des succès de leurs compatriotes, dont les armes victorieuses avaient acquis des établissemens héréditaires en Espagne, en Afrique et dans la Gaule, ils exigèrent qu’on leur partageât sans délai le tiers des terres de l’Italie, Oreste, avec un courage qui, dans un poste plus légitimement acquis, lui eût mérité toute notre estime, aima mieux s’exposer à la rage d’une multitude armée, que de souscrire la ruine d’un peuple innocent. Il rejeta la demande, et son refus favorisa l’ambition d’Odoacre. Cet audacieux Barbare assura les mécontens que s’ils voulaient le suivre, il leur ferait bientôt rendre par force la justice qu’on avait refusée à leurs demandes respectueuses. Enflammés tous du même ressentiment et des mêmes espérances, les confédérés sortirent en foule de tous les camps et de toutes les garnisons de l’Italie pour se ranger sous ses drapeaux, et le malheureux patrice, succombant à l’orage, se retira précipitamment dans la forteresse de Pavie, le siége