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ritable situation, se montrait dans le Capitole en robe de candidat, saluait d’un air de tranquillité, acceptait les offres de service, examinait les boutiques des marchands, tantôt de l’œil indifférent d’un spectateur, et tantôt avec l’attention d’un homme qui voulait acheter ; se plaignant toujours des temps, du sénat, du prince, et des délais de la justice. Il n’eut pas long-temps lieu de s’en plaindre. On annonça le jour de son jugement, et Arvandus parut avec ses accusateurs devant la nombreuse assemblée du sénat romain. Les vêtemens de deuil dont les députés avaient eu soin de se couvrir intéressaient les juges en leur faveur, et ils étaient scandalisés de l’air libre et de l’habillement magnifique de leur adversaire. Lorsque le préfet Arvandus et le premier des députés de la Gaule furent conduits à leurs places, sur le banc des sénateurs, on remarqua dans leur maintien le même contraste d’orgueil et de modestie. Dans ce jugement, qui offrit une vive image des formes de l’ancienne république, les Gaulois exposèrent avec force et liberté les griefs de la province ; et lorsque l’audience parut suffisamment animée contre le préfet, ils firent la lecture de la fatale lettre. Arvandus fondait sa présomption opiniâtre sur cette étrange prétention qu’on ne pouvait pas, disait-il, convaincre de trahison un sujet qui n’avait ni conspiré contre le souverain, ni tenté d’usurper la pourpre. À la lecture de la lettre, il la reconnut hautement et à plusieurs reprises pour avoir été dictée par lui ; et sa surprise égala son effroi, lorsque, d’une voix unanime, les sénateurs le