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peut paraître apocryphe ; mais elle n’était applicable qu’à un héros[1].

Perte de la flotte.

Genseric n’eut pas besoin d’une entrevue pour apprécier le génie et les desseins de son adversaire. Il eut bientôt épuisé sans succès ses ruses et ses délais accoutumés : ses propositions de paix devenaient à chaque instant plus soumises et peut-être plus sincères ; mais l’inflexible Majorien, fidèle à l’ancienne maxime, croyait que le salut de Rome dépendait de l’assujettissement de Carthage. Le roi des Vandales n’osait plus compter sur la valeur de ses sujets naturels, énervés par le luxe du midi[2] ; il soupçonnait la fidélité d’un peuple vaincu, qui le détestait comme protecteur des ariens ; et la précaution qu’il prit de faire un désert de la Mauritanie[3], n’arrêta point l’empereur romain, qui pouvait choisir le lieu de sa

  1. Procope, De bell. Vandal., l. I, c. 8, p. 194. Lorsque Genseric introduisit dans l’arsenal de Carthage cet hôte dont il était loin de soupçonner le rang, les armes résonnèrent sans qu’on les touchât. Majorien avait teint en noir ses cheveux blonds.
  2. … Spoliisque potitus
    Immensis, robur luxu jam perdidit omne.
    Quo valuit dum pauper erat.

        Panegyr. Major. 330.
    Il charge ensuite Genseric, assez injustement, à ce qu’il paraît, de tous les vices de ses sujets.

  3. Il brûla les villages et empoisonna les eaux. Priscus, p. 42. Dubos (Hist. critique, t. I, p. 475) observe que les magasins des Maures, que ceux-ci ont coutume d’enterrer, purent échapper à ses recherches. Ils creusent deux ou trois cents trous dans le même champ, et chaque trou contient