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doutable puissance[1]. Après avoir détruit sur la côte de Corse une flotte de Vandales, composée de soixante galères, Ricimer revint triomphant avec le surnom glorieux de libérateur de l’Italie. Il fit choix de cet instant pour annoncer à Avitus que son règne était fini ; et le faible empereur, éloigné de ses alliés les Visigoths, fut contraint d’abdiquer la pourpre après une courte résistance. Par clémence ou par mépris, Ricimer permit au monarque déposé d’échanger son trône contre le titre beaucoup plus désirable d’évêque de Placentia ; mais l’implacable ressentiment des sénateurs n’était pas satisfait, ils prononcèrent contre lui une sentence de mort[2]. Avitus prit précipitamment la fuite vers les Alpes, sans espoir d’armer les Visigoths en sa faveur ; mais dans le dessein de se mettre en sûreté avec ses trésors dans le sanctuaire de saint Julien, un des saints tutélaires de l’Auvergne[3]. Il périt sur la route, ou de maladie

  1. Voy. la Chronique d’Idatius. Jornandès (c. 44, p. 676) l’appelle, avec quelque raison, : Virum egregium, et pene tunc in Italiâ ad exercitum singularem.
  2. Parcens innocentiæ Aviti. C’est ainsi que Victor Tunnunensis (in Chron. ap. Scaliger Euseb.) s’exprime d’un ton de compassion dédaigneuse. Dans un autre endroit il le nomme Vir totius simplicitatis. Cette louange est plus modeste, mais plus solide et plus sincère que celles de Sidonius.
  3. Ce saint fut martyrisé, dit-on, sous le règne de Dioclétien, Tillemont (Mém. eccles., t. V, p. 279, 696). Saint Grégoire de Tours, qui lui était particulièrement dévoué, a dédié à la gloire de saint Julien martyr, un livre entier