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ficence[1]. Le sang ne souilla point l’entrée du roi des Visigoths, et ses soldats respectèrent la chasteté de leurs captives, particulièrement des vierges consacrées ; mais une grande partie du peuple et du clergé fut réduite en esclavage, et le pillage s’étendit jusqu’aux églises et aux autels. L’infortuné roi des Suèves avait gagné un des ports de l’Océan ; mais des vents obstinés s’opposèrent à sa fuite : il fut livré à son implacable rival ; et Rechiarius, qui ne désirait ni n’espérait point de grâce, reçut avec courage la mort qu’il aurait probablement infligée s’il eût été victorieux. Après avoir fait ce sacrifice à la politique et au ressentiment, Théodoric porta ses armes victorieuses jusqu’à Mérida, capitale de la Lusitanie, sans rencontrer d’autre obstacle que la puissance miraculeuse de sainte Eulalie ; mais il fut arrêté dans le fort de ses succès et rappelé précipitamment de l’Espagne avant d’avoir pu assurer la conservation de ses conquêtes. Dans sa retraite, il se vengea de ce contre-temps sur le pays qu’il traversa ; et, dans le sac d’Astorga et de Pollentia, sa conduite fut celle d’un allié infidèle et d’un ennemi barbare. Tandis que le roi des Visigoths combattait et remportait des victoires au nom d’Avitus, le règne

  1. Quæque sinu pelagi jactat se Bracara dives.

        Auson., De claris urbibus, p. 245.

    Le dessein du roi des Suèves prouve que la navigation des ports de la Galice dans la Méditerranée était déjà connue et pratiquée. Les vaisseaux de Bracara ou Braga naviguaient le long des côtes sans oser se hasarder dans l’Océan Atlantique.