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armée contribua sans doute à faciliter le traité, et à hâter sa retraite. Les jouissances du luxe et la chaleur du climat avaient énervé la valeur de ses soldats. Les pâtres du Nord, dont la nourriture ordinaire consistait en lait et en viande crue, s’étaient livrés avec excès à l’usage du pain, du vin, et de la viande préparée et assaisonnée à la manière des Romains, et les progrès de la maladie parmi eux commençaient à venger l’Italie[1]. Lorsque Attila déclara sa résolution de conduire son armée victorieuse aux portes de Rome, ses amis et ses ennemis concoururent à l’en détourner, en lui rappelant qu’Alaric n’avait pas survécu long-temps à la conquête de la ville Éternelle. L’âme intrépide que ne pouvait émouvoir la présence du danger, ne fut pas à l’abri d’une terreur imaginaire ; le roi des Huns n’échappa point à l’influence de la superstition dont il s’était si fréquemment servi pour le succès de ses desseins[2]. L’éloquence pressante de Léon, sa démarche majestueuse, et ses habits pontificaux, inspirèrent au prince bar-

  1. Si statim infesto agmine urbem petiissent, grande discrimen esset : sed in Venetiâ quo ferè tractu Italia mollissima est, ipsâ solis cælique clementiâ robur elanguit. Adhoc panis usû carnisque coctæ, et dulcedine vini mitigatos, etc. Ce passage de Florus est plus applicable aux Huns qu’aux Cimbres, et il peut servir de commentaire à la peste envoyée du ciel, dont Idatius et Isidore prétendent que furent attaqués les soldats d’Attila.
  2. L’historien Priscus rapporte d’une manière positive l’effet que produisit cet exemple sur l’esprit d’Attila. Jornandès, c. 42, p. 673.