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l’esprit de l’industrie commerciale. Le nom célèbre de Venise ou Venetia, appartenait autrefois à une vaste et fertile province de l’Italie, qui s’étendait depuis les frontières de la Pannonie jusqu’à la rivière de l’Adda, et depuis le jusqu’aux Alpes Rhétiennes et Juliennes. Avant l’irruption des Barbares, cinquante villes vénitiennes jouissaient de la paix et de la prospérité. Aquilée était une des plus magnifiques ; mais l’agriculture et les manufactures soutenaient l’ancienne dignité de Padoue ; et les possessions de cinq cents citoyens qui jouissaient du rang de chevaliers romains, montaient, d’après la plus rigoureuse évaluation, à un million sept cent mille livres sterling. Un grand nombre de familles d’Aquilée, de Padoue et des villes des environs échappées à la fureur des Huns, trouvèrent dans les îles voisines un humble mais sûr asile[1]. À l’extrémité du golfe où les marées de l’Océan se font faiblement sentir dans la mer Adriatique, on découvre une centaine de petites îles séparées du continent par des eaux fort basses, et défendues contre les vagues par de longues et étroites langues de terre entre lesquelles les vaisseaux peuvent pénétrer par des passages secrets et resserrés[2]. Jusqu’au milieu du cinquième siècle,

  1. Cette émigration n’est attestée par aucun contemporain ; mais le fait est prouvé par l’événement, et la tradition a pu en conserver les circonstances. Les citoyens d’Aquilée se retirèrent dans l’île Gradus, ceux de Padoue à Rivus-Altus ou Rialto, où la ville de Venise a été bâtie dans la suite, etc.
  2. La topographie et les antiquités des îles Vénitiennes