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sacrifiait la vie sans pitié, pouvaient exécuter les ouvrages les plus pénibles et les plus dangereux ; et les artistes romains vendaient peut-être leurs secours aux destructeurs de leur pays. Les Huns se servirent contre les murs d’Aquilée, des béliers, des tours roulantes et des machines qui lançaient des pierres, des dards et des matières enflammées[1]. Le roi des Huns employait tour à tour l’influence de l’espoir, de la crainte, de l’émulation et de l’intérêt, pour détruire la seule barrière qui retardât la conquête de l’Italie. Aquilée était alors une des plus fortes villes maritimes, et une des plus riches et des plus peuplées de la côte de la mer Adriatique. L’intrépidité des Goths auxiliaires, commandés, à ce qu’il paraît, par leurs princes nationaux, Alaric et Antala, se communiquait aux citoyens, qui se rappelaient encore la glorieuse résistance de leurs ancêtres contre un Barbare féroce et inexorable, qui déshonorait la majesté de la pourpre romaine. Après trois mois

  1. Machinis constructis, omnibusq. tormentorum generibus adhibitis. Jornandès, c. 42, p. 673. Dans le treizième siècle les Mongouls se servirent, pour renverser les murs des villes de la Chine, de machines construites par les mahométans ou les chrétiens qui servaient dans leur armée. Ces machines lançaient des pierres qui pesaient de cent cinquante à trois cents livres. Les Chinois employèrent pour leur défense la poudre à canon et même des bombes plus de cent ans avant qu’elles fussent connues en Europe, et cependant ces armes empruntées au ciel ou plutôt à l’enfer, ne purent sauver une nation pusillanime. Voyez Gaubil (Hist. des Mongous, p. 70, 71, 155-157, etc.)