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son fils aîné Torismond, à qui ils attribuaient avec raison tout l’honneur de la journée ; et le devoir de la vengeance devint pour le nouveau roi une portion sacrée de l’héritage paternel. Cependant les Goths eux-mêmes sentaient leur courage s’étonner de la contenance fière et terrible qu’avait conservée leur redoutable adversaire. Leur historien a comparé le roi des Huns à un lion dans sa caverne, menaçant avec un redoublement de rage les chasseurs dont il est environné. Les rois et les nations qui, au moment de sa défaite, auraient pu déserter ses étendards, sentaient que de tous les dangers, le plus à craindre pour eux et le plus inévitable, était la colère d’Attila. Son camp retentissait du bruit de ses instrumens guerriers, dont les sons animés ne cessaient de défier les ennemis ; et les premières troupes qui entreprirent de forcer ses retranchemens furent repoussées ou détruites par une grêle de traits lancés sur elles de toutes parts. On résolut, dans un conseil de guerre, d’assiéger le roi des Huns dans son camp, d’intercepter ses convois, et de le forcer à accepter un traité honteux ou un combat inégal ; mais l’impatience des Barbares dédaigna bientôt la lenteur de ces prudentes mesures, et la sage politique d’Ætius craignit de rendre, par la destruction des Huns, l’orgueil et la puissance des Goths beaucoup trop redoutables. Il employa l’ascendant de la raison et de l’autorité pour calmer le ressentiment que le fils de Théodoric regardait comme un devoir. Le patrice lui représenta avec une apparence d’attachement à