Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 6.djvu/303

Cette page a été validée par deux contributeurs.

point à la vertu d’Ætius, mais à sa prudence, que le petit-fils de Théodose dut la conservation de la pourpre et du vain nom d’empereur. Il laissa Valentinien jouir en paix des délices de l’Italie, tandis que le patrice se montrait avec tout l’éclat d’un héros patriote, et soutint, durant vingt années, les ruines d’un empire prêt à s’écrouler. L’historien des Goths avoue qu’Ætius était fait pour sauver la république[1] ; et le portrait suivant, quoique flatté, contient cependant plus de vérité que d’adulation. « Sa mère était Italienne, d’une famille noble et opulente, et son père, Gaudentius, qui tenait un rang distingué dans la province de Scythie, s’éleva graduellement d’un poste de domesticité militaire au rang de maître général de la cavalerie. Ætius, placé dans les gardes presque dès son enfance, fut donné comme otage, d’abord à Alaric et ensuite aux Huns. Il obtint successivement les honneurs civils et militaires du palais, et partout il fit briller un mérite supérieur. Il avait la figure noble et agréable ; sa taille était moyenne, mais admirablement proportionnée pour la beauté, la force et l’agilité. Il excellait dans les exercices militaires, tels que de manier un cheval, tirer de l’arc et lancer le javelot. Il savait supporter patiemment le défaut de sommeil et de nourriture ; son corps et son âme étaient également

  1. Reipublicæ romanæ singulariter natus, qui superbiam Suevorum, Francorumque barbariem immensis cædibus servire Imperio Romano cœgisset. Jornandès, De reb. geticis, c. 34, p. 660.