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la vie de son maître. » Le fils d’Arcadius, accoutumé au langage des flatteurs, entendit avec surprise la voix sévère de la vérité ; il rougit, trembla, et n’osa point refuser positivement la tête de Chrysaphius, qu’Eslaw et Oreste avaient ordre de demander. Théodose fit partir sur le-champ de nouveaux ambassadeurs revêtus de pleins pouvoirs, et chargés de présens magnifiques pour apaiser la colère d’Attila ; et la vanité du monarque fut flattée du choix de Nomius et d’Anatolius, tous deux consulaires ou patrices, l’un grand trésorier, et l’autre maître général des armées de l’Orient. Il daigna venir au-devant de ces ministres jusque sur les bords de la rivière de Drenco ; et le ton sévère et hautain qu’il avait affecté d’abord ne tint point contre leur éloquence et leur libéralité. Attila pardonna à l’empereur, à l’eunuque et à l’interprète, s’obligea par serment à observer les conditions de la paix, rendit un grand nombre de prisonniers, abandonna à leur sort les fugitifs et les déserteurs, et céda un vaste territoire au midi du Danube, dont il avait tout enlevé, jusqu’aux habitans. Mais avec ce qu’il en coûta pour obtenir ce traité, on aurait pu entreprendre une guerre vigoureuse et la terminer glorieusement. Les malheureux sujets de Théodose furent écrasés de nouvelles taxes pour sauver la vie d’un indigne favori dont ils auraient acheté plus volontiers la mort[1].

  1. On peut trouver les détails de cette conspiration et de ses suites dans les Fragmens de Priscus, p. 37, 38, 39, 54, 70, 71, 72. Cet historien ne donne point de dates