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Beric, chef inconnu peut-être de quelque tribu de Goths, eut la préséance sur les représentans de Théodose et de Valentinien. Le monarque barbare reçut de son échanson une coupe pleine de vin, et but obligeamment à la santé du plus distingué des convives, qui se leva de son siége, et porta de la même manière au prince l’hommage de ses vœux respectueux. Tous les convives, au moins les plus illustres, partagèrent successivement l’honneur de cette cérémonie, et elle doit avoir duré long-temps, puisque chacun des trois services qui furent présentés en nécessitait la répétition. Après la disparition des mets, le vin seul demeura sur les tables, et les Huns continuèrent de se livrer à leur intempérance, long-temps après le moment où les ambassadeurs des deux empires jugèrent que la sagesse et la décence leur prescrivaient de se retirer de ce banquet nocturne. Cependant, avant de le quitter ils eurent l’occasion d’observer les mœurs de la nation dans les amusemens de ses festins. Deux Scythes debout devant le lit d’Attila, récitèrent les vers qu’ils avaient composés pour célébrer sa valeur et ses victoires. Un profond silence régnait dans la salle, et l’attention des convives était enchaînée par des chansons qui rappelaient et perpétuaient le souvenir de leurs exploits. Une ardeur martiale brillait dans les yeux des jeunes guerriers, et les larmes des vieillards exprimaient leur douleur de ne pouvoir plus partager la gloire et le danger des combats[1]. À cette

  1. Si nous pouvons en croire Plutarque (in Demetrio,