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timent secret de la cour encouragea celui du clergé et des moines de Constantinople, que le zèle de leur archevêque avait entrepris de reformer trop précipitamment. Il s’était élevé en chaire contre l’usage des femmes qui servaient le clergé de la capitale sous le nom de domestiques ou de sœurs, et qu’il regardait comme une occasion continuelle de péché ou de scandale. Saint Chrysostôme accordait une protection particulière à ces pieux et silencieux solitaires qui se séquestraient du commerce du monde ; mais il censurait avec aigreur, et méprisait comme la honte de leur sainte profession, cette foule de moines dégénérés qui, attirés par d’indignes motifs de plaisir ou de profit, remplissaient sans cesse les rues de Constantinople. À la voix de la persuasion le prélat fut obligé de joindre celle de son autorité ; et son ardeur dans l’exercice de la juridiction ecclésiastique n’était pas toujours exempte de passion, ou guidée par la prudence. Saint Chrysostôme, naturellement d’un caractère emporté[1], tâchait de se soumettre aux préceptes de l’Évangile, en aimant ses ennemis personnels ; mais il se livrait sans résistance

  1. Sozomène et plus particulièrement Socrate ont peint le caractère de saint Chrysostôme avec une liberté impartiale et modérée qui a offensé ses aveugles admirateurs. Ces historiens tenaient à la génération qui succéda aux contemporains du saint archevêque ; la violence des partis ne subsistait plus, et ils eurent occasion de converser familièrement avec différentes personnes qui avaient été témoins de ses vertus et de ses imperfections.