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de chacune, s’il est permis de s’exprimer ainsi, était proportionnée au degré de population et de richesses qu’elle renfermait dans son sein, mais les seigneurs héréditaires de vastes possessions, qui n’étaient point gênés par le voisinage d’une grande ville, aspiraient au rang de princes indépendans, et s'arrogeaient le droit de paix et de guerre. Les jardins et les maisons de campagne, faibles imitations de l’élégance italienne, durent se convertir bientôt en forteresses, où les habitans des environs se réfugiaient dans les momens de danger[1]. Du produit de la terre on achetait des armes et des chevaux pour soutenir des forces militaires composées d’esclaves, de paysans et d’aventuriers sans discipline, dont le chef exerçait probablement dans son domaine l’autorité d’un magistrat civil. Une partie de ces chefs bretons tiraient peut-être leur origine d’anciens rois ; un plus grand nombre encore put être tenté de s’attribuer cette honorable généalogie, et de réclamer des droits héréditaires suspendus par l’usurpation des Césars[2]. Les circonstances et leur ambition purent

  1. Une inscription (apud Sirmond., Not. ad Sidon. Apoll., p. 59) décrit un château, cum muris et portis tuitioni omnium, construit par Dardanus dans ses terres près Sisteron, dans la seconde Narbonnaise, et qu’il avait nommé Théopolis.
  2. L’établissement de leur autorité n’aurait pas souffert de grandes difficultés, si l’on pouvait s’en rapporter au système impossible d’un savant et ingénieux antiquaire, qui prétend que les chefs des tribus bretonnes continuèrent toujours de régner, quoique avec un pouvoir subordonné,